Lorsqu’après avoir traversé la forêt des Ardennes au Nord ou les landes au Midi de cette ville, un pays où ne se rencontrent que de pauvres villages, que des constructions arriérées, l’étranger aperçoit tout à coup dominer bien au-dessus d’une agglomération de quatre à cinq cents maisons les vastes bâtiments d’une ancienne abbaye, et les deux dômes d’une église abbatiale plus grandiose encore, un vif sentiment de curiosité et d’étonnement le porte à se demander : Qui étaient ces hommes assez riches pour élever de si imposants édifices dans un pays dépourvu des matériaux les plus nécessaires à leur construction, et à une époque où les voies de communication manquaient entièrement ? Qui étaient ces solitaires assez épris de l’amour de Dieu pour venir fonder au milieu d’une clairière de la forêt des Ardennes, une retraite dont le nom a jailli par toute la chrétienté ? Quels sont leur commencement, leur vie et leur fin ? Quelle tempête les a balayés de leur splendide demeure ?